Claude Michel, auteure, compositrice, interprète

Une femme à la barre

Dans ses chansons, Claude Michel s’attache à « dénoncer au quotidien le machisme ordinaire ». Militante féministe de longue date, navigatrice passionnée, elle ne dévie pas de sa route. Son titre Vivre sa vie, qui clôture traditionnellement ses concerts, résume sa philosophie.

Claude Michel devint militante féministe avant de se lancer dans la chanson. Mariée très jeune, mère de quatre enfants et abandonnée par son mari à 24 ans, elle a repris des études  qui la conduisent à exercer comme professeure d’histoire-géographie. Dès la publication du retentissant « Manifeste des 343 salopes », elle rejoint la défense des droits à la contraception et l’avortement : « C’était trop important. On ne pouvait pas laisser passer ça. » La loi Veil promulguée en 1975, elle se consacre à la lutte contre les violences faites aux femmes.

Elle n’a jamais lâché le combat. Aujourd’hui, avec l’association l’Abri côtier à Concarneau, elle accompagne des femmes fuyant leur domicile pour échapper aux violences conjugales. « J’ai transformé l’association début 2000. La ville avait promis d’ouvrir des logements pour les SDF. Il n’y a eu que des lits pour des hommes. Donc, nous ne nous occupons plus que des femmes. » Avec une permanence téléphonique 24 heures sur 24 tenue par les bénévoles à tour de rôle, un accueil hebdomadaire dans un centre social, le paiement de chambres d’hôtel en cas d’urgence, des actions autour du 8 mars et du 25 novembre, l’Abri côtier ouvre une porte à quelque cinquante femmes par an. « C’est tendu, admet Claude Michel. Mais cette année, des femmes plus jeunes nous ont rejointes. » Qu’elle reste en contact avec les réalités les plus douloureuses vécues par les femmes transparaît dans ses chansons : elles sont justes, ressenties, émouvantes, elles frappent fort et souvent, font rire.

Dire ce qu’elle a à dire

Claude Michel a toujours aimé chanter. On lui disait : « C’est pas un métier où on croûte facilement. » Tout de même, il y a quelque trente-cinq ans de cela, elle décide de travailler à mi-temps, apprend à jouer de l’accordéon diatonique pour s’accompagner puis bientôt, compose ses propres chansons. « Je me suis dit : pourquoi ne pas dire ce que tu as à dire ? C’est un bon moyen de faire passer des idées. Si j’en parlais autour de moi, on me trouverait casse-pieds. » Elle se déclare « née avec une toile cirée sur le dos », se fichant depuis longtemps de ce qu’on pense d’elle, et sa résistance l’aide à supporter les réflexions machistes qu’elle peut subir lorsqu’elle se produit là où le public ne partage pas du tout ses idées. « Il faut le faire, pourtant ! »

Elle a chanté partout en France, mais aussi en Belgique, au Québec, au Sénégal et même en Afghanistan. « Je dénonce toujours les mêmes conneries », dit-elle. Son répertoire suit cependant l’évolution de la condition des femmes, partout dans le monde : des titres récents traitent de l’excision, des mariages forcés, de l’enfermement, des tournantes… « Une jeune fille afghane a aujourd’hui toute la vie devant soi, mais pas d’avenir. » Dans ses chansons, Claude Michel traite de faits qui la bouleversent elle-même : « ça me fait mal que ça existe. On me dit : tes chansons, tu les vis. C’est une des raisons pour lesquelles ça marche. Même si j’ai la chance d’avoir une voix particulière. »

Elle compose aussi sur sa passion, la mer. Claude Michel navigue et pêche depuis quarante ans. Elle tient la barre : « J’ai vite compris où était le meilleur endroit ! Des femmes à la barre, il y en a très peu. » Contrairement aux coéquipières malmenées par des maris un peu trop certains de leur talent de navigateur. Elle a traité avec humour ce thème dans La femme du plaisancier. « Ce que je dis est vrai, et les gens le savent. J’essaie de trouver des phrases qui font mouche. Certains hommes me disent : j’étais comme ça, mais je n’y avais jamais pensé. »

Cet été, Claude Michel donnera plusieurs fois son programme sur la mer – « Attention, ce ne sont pas des chants de marins ! », précise-t-elle. Son programme féministe, par contre, sortira trop peu à son goût. Elle tient à préciser qu’elle se déplace très volontiers pour l’interpréter. A bonnes entendeuses…


Pour en savoir plus

Claude Michel est aussi présente sur le site Chanson rebelle