Même pas peur des machos !

Depuis bientôt 30 ans, Oreda Alaya tient un étal de fruits et légumes sur les marchés. Un métier éprouvant, qu’elle adore, mais où elle a dû batailler ferme

pour faire sa place.

 

Toujours souriante, Oreda Alaya s’active derrière son étal multicolore. Connue et reconnue, elle a désormais ses fidèles, mais ses débuts, dans les années 1980, n’ont pas été faciles : « Les marchés, c’était un milieu très macho. Il n’y avait pas de structure, c’était la loi du plus fort. Moi j’arrivais du haut de mes 24 ans, je disais “pardon, s’il vous plaît”... On me répondait par des noms d’oiseaux. J’ai dû batailler avec les hommes. »

Heureusement, Oreda Alaya a du répondant : « Je suis issue d’une famille berbère, où les  femmes ne se laissent pas avoir par leur bonhomme. Je les ai toujours vu prendre les rênes de la famille. J’ai suivi l’exemple. Je ne vois pas pourquoi une femme resterait en retrait dans le couple. » Cet exemple, elle l’a transmis à ses filles : « Je pousse mes filles à être hyper autonomes. J’en ai une qui fait des études dans le bâtiment. Si c’est son truc, pourquoi pas ? Elle a délavé son bleu de travail en rose. On la voit de loin ! »

 

Plus de femmes - moins d’argent

Très attachée au marché du dimanche matin à Basse-Indre, où elle tient toujours son étal de fruits et légumes, elle raconte y avoir évolué dans son métier, parce qu’elle s’est investie dans l’association des commerçants. Le collectif lui a insufflé la force nécessaire pour passer les obstacles : « Sur le quai, il y avait un petit café tenu par une femme, qui a dû fermer. Les femmes y allaient, c’était convivial, on échangeait des idées. Ça serait bien d’avoir un lieu comme ça, où on peut se retrouver entre femmes,  parler, se laisser aller... pour mieux repartir. »

Oreda Alaya déplore le manque de femmes dans les instances décisionnelles : « S’il y a plus de femmes au pouvoir, ça ne pourra que mieux aller. Les femmes apportent des solutions, elles sont plus pragmatiques. Il faudrait les écouter plus... Mais est-ce que la société est prête ? »  Elle en doute. Et de désigner comme coupable le poids que fait peser sur les femmes la vie domestique : « Les hommes, ils n’ont que leur boulot, ils peuvent faire de la politique. Pour qu’il y ait plus de femmes dans la vie publique, il faudrait qu’elles aient moins de charge de travail. »

Sur les marchés, raconte-t-elle, les mentalités ont évolué, le milieu s’est ouvert : « Maintenant, c’est plus facile de s’installer. » Mais il y a un mais : « On gagne beaucoup moins bien notre vie. » Relation de cause à effet ? « Il y a beaucoup de femmes maintenant sur les marchés. Beaucoup de femmes seules avec enfants. » Oreda Alaya salue leur détermination : « Elles n’ont pas de diplômes, mais elles ont la force et le talent. Les femmes gaillardes, il faut les mettre en valeur ! »