J'ai de la valeur

Lundi 25 avril 2016 : troisième atelier Expression. 

Avec : Amira, Emeline, Florentine, Gaëlle, Martine, Saïda, Shahila, Solange et Yolenn.

Lors de l'atelier précédent, Yvelle avait lancé un thème : "J'ai de la valeur". Elle n'est pas présente pour préciser ce qu'elle entendait par là. Cerner un peu plus la phrase sera le point de départ de la discussion du jour.

Saïda pense qu'on doit "parler de toutes les valeurs. La valeur de la personne, la valeur des femmes aussi, la valeur physique, la valeur mentale, la valeur du travail, tout." Pour Solange, penser ou dire "j'ai de la valeur" revient à dire que "on s'accepte telle que l'on est, qu'on se considère, qu'on accepte que les autres nous voient toujours belle, qu'ils nous acceptent aussi." Yolenn s'affirme "persuadée que tout personne a un petit point de valeur en elle, il suffit d'aller le chercher." Emeline dit que "la valeur, c'est ce qu'on a fait dans la vie. Mais elle n'est pas toujours reconnue." Ce à quoi Gaëlle répond que "une valeur non reconnue existe quand même. Mais c'est important qu'elle soit reconnue, surtout pour soi-même. Sinon, on est malheureuse." Toutes sont d'accord sur ce point : savoir sa valeur reconnue rassure, remonte le moral, pousse à avancer. Saïda le résume par : "On peut être aimée."

Mais est-on aimée pour sa valeur ? De l'avis général, oui. Martine ajoute que "la valeur ça peut être un sentiment, aussi. Il y a des gens qui n'aiment qu'eux, par contre il y a des gens qui sont très près des autres. Aimer les gens, c'est une certaine valeur."

Gaëlle croit à la méthode Coué : "Si on se dit "J'ai de la valeur", même si on n'a pas de richesses, même si on n'est pas très instruit, on prend effectivement de la valeur et de l'assurance." Et peut-on choisir la valeur qu'on voudra cultiver en soi ? Si Yolenn affirme qu'en tant qu'être humain, on a toujours le choix,  Martine estime que l'on naît avec sa valeur. Emeline souligne qu'on accorde beaucoup de valeur aux personnes après leur décès. "On se rappelle que du bien", ajoute Saïda. Personne ne semble souhaiter qu'on manifeste davantage de sens critique vis-à-vis des morts.

 

Amour, un mot aimé

Quelle est pour chacune la valeur essentielle ? Pour Emeline, l'honnêteté; pour Florentine, la sincérité; pour Gaëlle, l'altruisme et l'amour. Solange place au sommet la faculté de "savoir consoler. Savoir quoi dire." Elle se reproche de ne pas savoir "donner le mot dont la personne a besoin." Les autres lui demandent si elle sait écouter. Oui ? Alors, c'est le principal concluent-elles d'un commun accord. Saïda, qui s'accuse de trop hésiter avant d'agir, apprécient les personnes qui savent conseiller et rassurer. Yolenn déclare :"Je mets la loyauté au-dessus de tout. L'amitié a besoin de loyauté." Martine regrette : "Je voulais dire amour, mais Gaëlle me l'a piqué !" Alors elle met en avant "savoir partager avec d'autres ce qu'on sait." Il est question ici de transmettre le savoir et la mémoire. Solange souligne : "Il y en a qui disent "je n'ai pas le temps pour ça". Mais celui qui a le temps, a la valeur."

Gaëlle rappelle que beaucoup de femmes venant au Lieu "ont été dévalorisées, rabaissées." Toutes pensent que le Lieu les aide à retrouver de l'assurance. Saïda prend la parole : "Moi je peux confirmer. Quand je suis arrivée au début, ce n'était pas pour faire des connaissances, pas pour rester manger, c'était juste pour laver mon linge car je n'avais pas de sèche-linge chez moi. On m'a proposé de rester manger le temps que le linge tourne, discuter un peu... C'est comme ça que ça a commencé. Maintenant, j'ai un lave-linge chez moi mais je viens quand même ! ça m'a sortie de l'isolement. Petit à petit, si on est seule chez soi, surtout si on n'a pas de travail à l'extérieur, on se fait des reproches, on perd beaucoup de sa confiance." Toutes témoignent : Saïda a beaucoup changé.

 

Valeur, pas talent

Elles acceptent de confier ce qui, d'après elles, leur donne à chacune sa valeur. Emeline met l'accent sur sa "valeur morale". Florentine, dont c'est la première visite au Lieu et qui a eu le courage de participer à l'atelier, ne sait pas dire. Les autres lui soufflent : sa gentillesse, qu'elle porte sur son visage. Pour Gaëlle, c'est sa "disponibilité pour les autres". Solange se félicite "d'éviter de critiquer les autres à leur insu." Amira proteste : "Si quelqu'un fait une chose et qu'on est obligée de le critiquer, on le critique !" Solange réplique que "si on vient te le dire en face, ça va peut-être te déranger un moment, mais c'est mieux acceptable." Saïda porte à son crédit de bien aimer "se rattraper" si elle a commis une erreur. Elle raconte faire tous les soirs le bilan de sa journée et, si elle s'estime en tort envers une personne, se promettre de lui présenter ses excuses. Son récit impressionne tout le monde. "Moi, je me pose beaucoup moins de questions ! lance Martine. Généralement, ça va. La valeur que je m'imagine, c'est mon amour pour les gens. Et en particulier, les femmes. Je ne suis pas homosexuelle mais j'adore les femmes. D'abord, on se ressemble tellement. Être bénévole ici avec des femmes de tous les horizons, c'est extraordinaire, c'est une richesse." Amira vante son courage, "par rapport à mon plus jeune âge. Je n'ai que 19 ans, je me retrouve seule depuis trois ans, mais j'avance trop bien. Et sincèrement, je me suis trouvée dans des situations... Mais je trouve souvent des solutions, j'ai toujours le courage pour avancer et ça fait que j'avance plus vite que les autres, même les plus âgés que moi. C'est pas moi qui ai remarqué ça, c'est une travailleuse sociale." Yolenn situe sa valeur dans le fait qu'elle a "les excuses faciles. ça aide bien à vivre, de ne pas être sensible aux critiques malveillantes."

Toutes les femmes réunies ont situé leur valeur dans des comportements favorisant la vie sociale. Aucune n'a cité un talent spécial ou son intelligence. "Ce sont des qualités, et pas toujours des bonnes qualités." Cette possibilité les  choque même. "C'est prétentieux". Mais pas une non plus n'a dit : je ne suis pas une personne de valeur !