À la rencontre du travail

Le Rallye des métiers offre à des collégien.nes l’occasion de découvrir la réalité de professions qui les attirent, via des rencontres avec celles et ceux qui les pratiquent.

Pour la cinquième année consécutive, l’association Style Alpaga organisait, en partenariat avec le collège Debussy, un Rallye des métiers. Quarante élèves de 4e du quartier Bellevue à Nantes avaient ainsi rendez-vous avec des professionnel.les, sur leur lieu de travail. Elles/ils avaient choisi les métiers, parmi ceux qui attisent leur curiosité, voire qu’elles/ils se verraient bien exercer plus tard. Objectif : interroger leurs hôtes pour approcher leur pratique quotidienne. Autrement dit, apprendre quelles sont les contraintes et les joies de professions dont elles/ils rêvent sans les connaître vraiment.

Bouger intelligentes

Accompagné.es d’un.e adulte et muni.es d’un questionnaire à soumettre à leurs hôtes, elles/ils sont parti.es le matin pour trois rencontres consécutives. Emulsion a suivi Chirana, Kelly et Odessa, et leur accompagnatrice, Anne-Pauline Ngbanzo, en service civique à l’AFEV. La jeune femme, bien que sortant d’une école de commerce, se destine à l’animation. Dès la porte du collège franchie, elle ne manque pas une occasion d’informer les jeunes sur la configuration de la ville, les lignes de transport, les cycles scolaires… Toute la journée, elle reviendra sur son leitmotiv : il faut absolument obtenir son bac ! Donner aux élèves l’envie et le courage de poursuivre leurs études fait aussi partie des objectifs du Rallye des métiers.

Envahissant, le travail !

Kelly pense à devenir vendeuse dans le prêt-à-porter. Tommy Auger, directeur d’un grand magasin de vêtements Kiabi, reçoit le groupe. Il raconte son parcours sinueux, qui l’a mené du droit à la vente. Il communique son enthousiasme aux jeunes filles, qui trouveront cette rencontre « agréable, car il aime son métier, ça donne envie. ». Anne-Pauline Ngbanzo traduit des mots étranges comme management ou marketing. Mais les horaires débordants de Tommy Auger, occupé dix à douze heures par jour au magasin, stupéfient plus encore les collégiennes. Kelly renonce à devenir chefe : « Il y a trop de travail ! ». Pour le moment, du moins, car elle admet que l’âge peut la faire changer d’avis.

Objectif indépendance

Elles vont retrouver cette question du temps de travail lors de leur deuxième visite. A la demande de Chirana, elles poussent la porte d’un institut d’esthétique. Delphine Bossard a ouvert boutique il y a trois ans, après avoir travaillé sans s’autoriser de congés durant une bonne dizaine d’années. Elle souligne l’endurance physique, et la disponibilité envers les client.es, que nécessite sa profession. Elle ne cache pas que la gestion de la boutique l’occupe énormément. Mais tout cela ne décourage pas Chirana. « La patience, ça s’apprend », affirme-t-elle. Le contact avec l’esthéticienne restera le moment préféré des jeunes filles, parce que ce métier « féminin » les fascine, certes, mais aussi parce que Delphine Bossard a acquis une indépendance qui les tente. Ne pas avoir de supérieur hiérarchique, voilà un objectif qui mérite des efforts.

Et le revenu ?

Autre surprise à la dernière visite : on peut travailler beaucoup et gagner très peu. Noëlle Provot est modiste. Elle raconte sa rencontre avec le chapeau, et son entrée dans son métier passion. Elle expose et vend ses créations dans la boutique Kezaly, au centre ville de Nantes. On y trouve aussi celles de la styliste modéliste Claire Ploquin. Les trois jeunes filles se montrent d’emblée stupéfaites devant les étiquettes : le prix des vêtements et des couvre-chef dépasse leur entendement. Noëlle Provot ne pourrait pas se les offrir, vont-elles comprendre quand la créatrice leur confie, à leur demande, son revenu mensuel très modeste. Artisane indépendante, elle consacre pourtant aussi du temps à la gestion de son activité. Chirana, Kelly et Odessa restent perplexes. Elles se sont promises de faire « un travail qu’on aime. Sinon, il n’y a pas de motivation. » De la motivation, il leur en faudra tout au long du chemin, comprennent-elles.

A la fin de l’après-midi les collégien-nes se retrouvent dans les locaux de Style Alpaga. Tout en dévorant leur goûter, elles/ils donnent leurs impressions de la journée sur le mur d’expression installé à cet effet. Leur meilleur souvenir ? Pour beaucoup, le déjeuner en ville, une rareté très appréciée. Il faut du temps pour que ces rencontres déconcertantes portent leurs fruits.