Ménopausée - et alors ?

Retour de la conférence de Cécile Charlap, sociologue et autrice de  La fabrique de la Ménopause, par Tiphaine Pottier, médiatrice sociale à la Cité Côté Femmes.

Quand Cécile Charlap décide d'étudier la question de la Ménopause dans nos sociétés, elle se heurte rapidement à un constat inconfortable: Sujet tabou par excellence, quand il est évoqué il est bien souvent synonyme de violence. Véhicule ingrat de la dévalorisation sociale des femmes.

La manière de penser la ménopause touche à la vision de la femme et de son vieillissement dans notre société. Heureusement, cela n'est pas le cas partout... La conférencière aborde rapidement l'exemple du Japon et de la civilisation Maya, cultures dans lesquelles il n'existe pas de mots pour qualifier cette période. Les études anthropologiques sur le sujet évoquent l'étonnement même des femmes interrogées sur la question ! Étape naturelle du déroulement de la vie, la fin des règles dans la culture nippone n'évoque rien d'autre qu'une continuité de l'activité reproductrice qui se prolonge simplement dans l'éducation des grands enfants et petits enfants. Voilà qui fait plaisir à entendre.

Au sein de l'ethnie Beti du Cameroun, la femme ménopausée accède même à un titre et un statut de pouvoir. La ménopause valorise la femme.

En occident, on est bien plus sévère. Au début de 19ème siècle un charmant médecin écrit De la ménopause ou de l'âge critique des femmes. Le bal des injonctions négatives est ouvert. La femme vit une période où affaiblie, elle n'a plus de force pour expulser le sang de son corps. Merci !

La conférencière distingue deux types de ménopauses : la ménopause physiologique et la ménopause sociale.

Ménopause Sociale : des ouvrages médicaux aux traitements vulgarisés dans la presse, le constat est édifiant. Socialement, la femme qui est ménopausée, ou qui décide de grossesse après 40 ans, commet une infraction à la norme, s'inscrit immédiatement dans une démarche risquée, est systématiquement fragilisée et vulnérable.

La maternité tardive est « dangereuse », la femme en chute hormonale est sujette aux cancers etc etc … On remarquera que la paternité tardive est bien moins souvent décriée!

Ménopause Physiologique : jamais associée à une évolution de notre corps, la ménopause est toujours décrite par ce qui s'arrête, ce qui n'est plus, ce qui est difficile et désagréable. Et même ce qui n'est pas NORMAL, car oui, la femme normale est la femme FECONDE.

Comment est ce vécu ? Cécile Charlap a récolté les témoignages de trente femmes, de 45 à 65 ans, venant toutes de catégories socio-professionnelles différentes. C'est évident. La ménopause n'est pas vécue de façon similaire par toutes. Différents paramètres sont à prendre en compte et, l'expérience et le rapport de chaque femme à son corps est évidemment déterminant.

Pour Lisette, c'est une libération, pour Josepha, c'est enfin une sexualité libérée de la contraception, Hélène elle, n'a rien senti. Pour Patricia, «c'est normal, je suis grand- mère». Inès est catégorique : «moi, ménopausée je suis bien plus active sexuellement qu'à 35 ans, plus de gosses à gérer, plus de contraception à gérer... c'est vachement mieux !».

Le rapport au corps médical aussi, diffère. Certaines ont été accompagnées, écoutées, là où d'autres se sont retrouvées assaillies par une montagne d'hormones prescrites sans leur avis.

C'est là que la solidarité, la sororité doit s'imposer. Et Annette, n'a pas eu le choix de se tourner vers ses amies et sa belle fille pour trouver une alternative plus douce et naturelle.

Enfin, l'entourage proche, le ou la compagne peut être à la fois le soutien, l'accompagnant compréhensif, ou bien l'ingrat miroir de «l'affaiblissment» du corps.

Dans tous les cas, les témoignages sont radicaux, dans un sens ou dans l'autre. La ménopause est un sujet qui ne prête pas à l'eau tiède ! Elle est le dernier épisode d'un long voyage du corps de la femme dans la société depuis sa plus tendre puberté.