Maltraitances au travail

À l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, l’UL CGT

de Saint-Herblain a organisé une conférence de presse. On y venait écouter les témoignages de femmes que le travail malmène.

 

L'Union Départementale CGT 44 et son collectif Femmes-Mixité ont aussi participé à l'organisation et l'animation de cette rencontre, à l’approche du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, afin de souligner que la division sexuelle du travail perdure et que nul progrès dans le sens de l’égalité professionnelle ne pourra être accompli sans au préalable une reconnaissance de ce fait. Si les femmes perçoivent des salaires moindres, c’est aussi parce qu’on leur réserve des emplois supposés non-qualifiés. Elles abondent dans les métiers d’entretien, de soins, d’accueil, où l’on ne reconnaît pas leurs compétences parce que celles-ci, pourtant indéniables, relèveraient de qualités dites "féminines" naturelles. Les femmes qui se sont exprimées durant la rencontre font partie de ces travailleuses dont on nie les savoirs et les savoir-faire, qu’on harcèle, sexuellement aussi, et qui doivent se battre pour imposer leurs droits.

Elles travaillaient toutes les trois dans une association dédiée aux retraité·es soutenue par la mairie. La comptable, la secrétaire et l’animatrice étaient de bonnes collègues, unies, dynamiques, appréciées par les adhérent·es, heureuses dans leur travail, quand le CA mit à la tête de l’association un directeur qui « ne voulait entendre qu’une seule voix, la sienne. » Il se définissait comme un « phallocrate dominant ». Les brimades, les humiliations, les regards déplacés, les remarques à consonance sexuelle, entraînent outre les souffrances, des incompréhensions et des désaccords ; l’harmonie de l’équipe est détruite. Il faudra des années avant qu’elles se regroupent et dénoncent. Résultat : leur employeur en  licencie deux pour « inaptitude », sur un avis délivré à toutes les trois par la médecine du travail suite à une expertise en psychopathologie. La troisième réintègre un poste dont elle était détachée. Les dommages sur leur santé sont lourds. Une crise sur le lieu de travail a déjà provoqué chez l’une des salariées un accident de travail suivi d’un arrêt maladie, durant lequel on continue à la harceler en la privant d'une grosse partie de ses indemnités journalières. Elles ont cependant saisi les prud’hommes, décidées à ce que soient aussi reconnue la responsabilité de leur employeur, le président de l’association qui a vainement tenté de briser leur élan en les effrayant.

Elles aiment leur travail, mais pas la façon dont on le leur fait exercer. L’association d’aide aux personnes à domicile qui les emploie est importante (quelque deux mille salarié·es) mais n’use pas son temps, ni surtout son argent, à tenter d’améliorer les conditions de travail de ses employé·es. L’organisation pose problème : un temps minimal de trajet est imposé entre les domiciles à visiter, sans tenir compte des éventuels embouteillages, etc. « On accorde toujours le temps prévu à une personne. S’il y a un retard, on reste plus longtemps. Le temps supplémentaire, c’est pour nous. » Avec les décalages professionnels et personnels que cela implique. Les déplacements se font avec le véhicule personnel, sans compensation hormis une maigre indemnisation des frais d'essence, alors que la fréquence d’utilisation l’use. Les services rendus outrepassent souvent leurs attributions : on ne laisse pas une personne âgée souillée sous le prétexte que l’infirmière doit venir dans une heure ou deux. À la fois la tâche à accomplir et les besoins ou souhaits des personnes demanderaient du temps. Or le temps, les aides à domicile ne cessent de courir après ; elles ne peuvent accomplir leur travail avec le soin qu’elles voudraient. Elles mettent en œuvre des compétences multiples sans que leur savoir-faire ne soit reconnu. « Ce qui me fait le plus mal au cœur, c’est de passer un temps intermédiaire (temps d’inemploi non payé – ndlr) dans ma voiture, au froid, alors que le local de l’association est bien assez grand pour nous accueillir. » Certes, mais il ne faudrait pas habituer les employé·es à des égards !

Également sous-payées, dévalorisées, précaires, avec de surcroît des horaires éreintants, les assistantes maternelles poursuivent leur lutte. La menace gouvernementale qui les a fait sortir de leur foyer où on les jalouse trop souvent d'exercer, c’est de se voir privées de la compensation allouée par Pôle Emploi en cas de départ, pour quelque raison que ce soit, d’un ou plusieurs des enfants dont elles s’occupent. Si la mesure devait s’appliquer, plusieurs d’entre elles ne pourraient plus faire face financièrement et devraient donc cesser leur emploi. À la précarité, succèderait le chômage.

 

Les métallurgistes ont eu besoin de temps et de patience pour s’imposer dans un milieu essentiellement masculin. Un milieu où le harcèlement sexuel est considéré comme une tradition nullement malveillante, une norme qu’on suit avec le sourire, sans se soucier du désagrément de celle qui reçoit ces « hommages » dégradants. Propos grivois, regards insistants focalisés sur les seins... Un petit chef est coutumier de ces pratiques. Elles ont été signalées à l’employeur, sans réaction de sa part. Plusieurs années plus tard, l’homme va trop loin en harcelant une apprentie. Force est de le sanctionner. Mais la nature de sa faute ne sera jamais nommée. Il part sous rupture conventionnelle, discrètement, avec toutes les garanties préservant sa vie professionnelle, supposent les salariées qui n’ont pas été informées du processus.

Des représentantes du collectif Privés d’emploi et Précaires confirment ces témoignages. Des femmes se retrouvent dans des situations de précarité, de plus en plus nombreuses, de plus en plus fréquemment, dans des situations personnelles et familiales de plus en plus difficiles à gérer. Et les retraitées, également représentées ce soir-là, que disent-elles ? À un salaire moindre (en moyenne un quart en moins que les hommes, toutes professions confondues), succède naturellement une pension de retraite moindre. L’action doit donc commencer bien avant : ouverture de toutes les professions aux femmes, revalorisation des professions sous-estimées parce que considérées comme « typiquement féminines » et dans les faits majoritairement exercées par des femmes, suppression de la précarité, égalité salariale.